Homélie du 23è dimanche du temps ordinaire, année C
Bien aimés du Seigneur,
L'extrait de la première lecture qui nous est proposé aujourd'hui est tiré du livre de la sagesse. Avec les biblistes, nous savons que le livre de la Sagesse a été rédigé en Egypte, plus précisément à Alexandrie. Dans l'antiquité, Alexandrie était une ville à renommée intellectuelle. Intellectuelle car elle disposait d'une école pour former des philosophes, des scientifiques et des techniciens. Ceux-ci avaient la science et la connaissance certes. Mais comparé à la sagesse divine, leur savoir était comme une goutte d'eau en face de l'immensité de l'océan. Alors, constatant que l'homme, malgré son savoir, ne saurait prétendre avoir la totalité, la plénitude de la vérité, pour nous montrer que l'homme, l'auteur du livre de la Sagesse nous enseigne ce qui suit : : " les réflexions des mortels sont incertaines, et nos pensées, instables...". Effectivement, quelles que soient les idées, que l'homme agite, quelles que soient les réflexions qu'il mène, sa connaissance reste limitée et entachée d'imperfection. Le seul capable de détenir la vérité fiable et stable, c'est Dieu, l'insaisissable, le transcendant, le tout autre.
Dans le psaume responsorial que nous avons chanté tout à l'heure, nous lisons ce qui suit : "Que vienne sur nous la douceur du Seigneur, notre Dieu ! Consolide pour nous l'ouvrage de nos mains". Aujourd'hui, vue l'évolution de la science et de la technique, vus les progrès accumulés dans beaucoup de domaine, l'homme se croit capable de gérer l'univers à sa guise, comme il le veut, sans se soucier des lois que le régissent. Alors, livré aux caprices de l'homme, l'univers entier crie les douleurs d'un enfantement qui nous déstabilise : qu'il nous souvienne la canicule et les feux de brousse enregistrés çà et là cet été ; l'assèchement des nappes phréatiques et des étangs ces derniers mois à cause de la rareté des pluies. Tout cela est dû à l'orgueil et à la vanité de l'homme qui veut à tout prix dominer la nature en banalisant les lois qui la maintiennent en équilibre. Chers amis, l'homme n'est que cocréateur. Le véritable créateur c'est Dieu lui-même. Alors toute action, toute intervention, toute œuvre humaine qui ne s'inscrit pas dans le projet d'amour de Dieu, n'est qu'une peine perdue, une initiative vouée à l'échec.
La deuxième lecture que l'Eglise nous propose en ce jour est une épître écrite par saint Paul à Philémon, au sujet d'Onésime. Qui est Philémon et qui est Onésime ? Philémon c'est un notable de Colosse qui avait des esclaves à son service. Parmi ses esclaves, se trouvait Onésime. Ce dernier pour une raison ou pour une autre, réussit à s'évader de la maison de Philémon, son maître. Dans sa fugue, Onésime rencontra Paul et se convertit au Christianisme. A l'époque, lorsqu'un esclave fuguait, cela était passible de peines sévères ou de prison. Alors, bien conscient de cela, Paul saisit sa plume pour plaider en faveur d'Onésime, auprès de son maître Philémon qui était entre autre un chrétien, c'est-à-dire un fidèle laïc appartenant à la communauté chrétienne que Paul avait lui-même fondée à Colosse au cours de ses voyages missionnaires.
La finalité de cette lettre que Saint Paul adresse à Philémon vise à faire comprendre aux nouveaux convertis au Christianisme que désormais les seuls liens qui les unissent les uns aux autres sont les liens d'amour et d'égalité. Effectivement dans la lettre aux Galates, saint Paul affirme ce qui suit : " il n'y a plus ni Juif, ni Grec, il n'y plus ni esclave, ni homme libre, il n'y a plus ni homme, ni femme, car vous tous, vous êtes un en Jésus-Christ. Ga 3,28. Du coup, quels que soient les problèmes, les tensions, les divisions qui secouent notre Eglise, nos diocèses, nos communautés paroissiales, nous devons réaliser qu'Eglise, nous formons un seul corps; nous avons égale dignité, nous sommes tous frères.
Dans l'évangile que nous venons d'entendre, Jésus, pour amener ses disciples à résister aux tentations et aux épreuves dans leur vie de foi, les invite à rester attacher à lui. Il leur dit : " Si quelqu'un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple". Ces paroles de Jésus peuvent, à priori choquer car en les lisant, elles semblent contredire les prescriptions du décalogue qui nous exhortent radicalement à respecter nos parents et à aimer nos frères et sœurs. Mais en réalité lorsque Jésus parle ainsi, il voudrait simplement nous exhorter à la vigilance afin d'éviter les entraves, les chaînes, les liens fraternels et familiaux, bref toutes les relations possibles qui pourraient nous empêcher de vivre librement et pleinement notre vie de foi en Jésus-Christ.
Puisse l'Esprit du Seigneur raviver notre âme afin que nous tenions aux heures de joies et d'épreuves, Amen !