Homélie du 12è dimanche du temps ordinaire Année A
Un jour, un jeune prêtre fraîchement sorti du séminaire demanda à son curé de l'autoriser à enseigner publiquement la catéchèse à la place du village. Et le curé de lui répondre : " Mon frère, si c'est pour l'avancée du royaume, vas-y seulement, tu as mon approbation ; mieux, ma bénédiction t'accompagne ! ".
En peu de jours, le jeune prêtre accumula tellement de succès qu'on aurait l'impression que tout le village était suspendu à ses lèvres ; et cela à cause de son éloquence. Effectivement Chrysostome, le jeune vicaire avait une bouche d'or.
Alors, craignant de retrouver son couvent vide, le terrible féticheur de la localité se rendit sur les lieux de l'instruction catéchétique pour menacer le jeune pasteur. D'un air hautain et méprisant il lui dit : "Quelle outrecuidance jeune homme ! Dis-moi, qui t'a donné pouvoir de venir rogner sur mon territoire ? Eh bien ! Si ton Dieu est plus puissant que mes fétiches, j'abandonnerai tout pour l'adorer ; mais si mes idoles sont plus fortes que lui, alors c'est toi qui subiras le courroux de leur châtiment." A ces mots, il y eut un silence lourd, une atmosphère glaciale.
Surpris et quelque peu intimidé par la provocation de son adversaire, le jeune prêtre, observa un moment de silence avant de relever le défi " : si vous voulez braver le Créateur du ciel et de la terre, dont je suis le serviteur, alors tentez seulement, moi je suis prêt. "
" Pauvre imprudent, reprit le terrifiant féticheur, tu ne sais vraiment pas à qui tu oses te mesurer ". Se tournant ensuite vers la foule, il ajouta : " Ce soir, la moto du prêtre ne démarrera plus ; ainsi il verra qui est le plus fort." En disant ces mots, il fit des gestes de "malédiction" en direction de la mobylette, avant de se retirer tout doucement sous le regard réprobateur de la foule. Le défi était sérieux.
A la fin de son enseignement, le jeune prêtre se dirigea vers sa petite moto sous le regard inquiet de la foule. Il l'enfourcha et essaya de la démarrer. Après deux tentatives infructueuses, le moteur démarra soudain dans un vrombissement tonitruant, aussitôt couvert par les acclamations de la foule. Il venait de remporter le défi en montrant que son Dieu était plus fort que les idoles de son adversaire.
Mais posons- nous la question : que serait-il passé si la mobylette avait refusé de démarrer? Certains n'auraient-ils pas perdu la foi en donnant raison au féticheur ? Les chrétiens de ce village n'auraient-ils pas été profondément déçus par le silence de Dieu et son apparent échec devant la prétention d'un " jeteur de sort ? "
Aujourd'hui comme hier, l'évangélisation nous met en situation permanente de défi. Mais le Christ nous promet le secours indéfectible de Dieu en toute situation, fût-elle périlleuse : «Quant à vous frères et sœurs soyez sans crainte, même les cheveux de votre tête sont comptés ".
Autrement dit, dans les situations douloureuses, terrifiantes, dans les heures de doute épais, dans les moments de rudes épreuves, Dieu garde et gardera toujours le contrôle sur tout et sa la main agissante nous fraie et nous frayera sans ambages un chemin d'espérance afin de nous mettre à l'abri de tout danger. Même au cœur d'un péril imminent, Dieu peut tout. Il suffit de lui faire confiance, d'avoir foi en Lui. " La foi, si vous l'avez aussi petite comme une graine de moutarde, vous direz à ce sapin, déracine-toi d'ici et va te trouver une place dans la Bidassoa et il vous obéirait "
Et pour fortifier notre foi, l'auteur sacré nous relate, dans la première lecture, comment Dieu a agi d'une main secourable dans la vie du prophète Jérémie. Lisons-le une fois encore : " dénonçons-le, allons le dénoncer, celui-là, l'épouvante, l'homme qui voit la terreur partout ! ". Evidemment le prophète était exposé, à la calomnie et aux outrages de ses ennemis ; pire, il était même malmené par ses proches. Certains sont allés même pousser le roi à le déposer dans une citerne vide, sans pain, ni boisson afin qu'il en meure d'épuisement. Mais Dieu va encore susciter du sein de ce même peuple quelqu'un pour parler au roi et le dissuader pour lui garder la vie sauve.
Tout ce que nous lisons concernant ce prophète, est sans doute le bilan de son sinistre ministère prophétique avant l'exil. Mais ce qui est marrant dans ce texte c'est l'attitude de Jérémie lui-même : après avoir bénéficié de l'action secourable de Dieu tout au long de sa vie; voici ce qu'il dit : " Seigneur de l'univers, Toi qui scrutes les cœurs et les reins, fais-moi voir la revanche que tu vas leur infliger, car c'est à Toi que j'ai remis ma cause ".
Chers amis, l'être humain (prêtre, prophète et roi, citoyen ou migrant, esclave ou homme libre) quoiqu'il soit, a toujours le cœur hanté par le désir de vengeance. Jérémie a souffert, mais le Seigneur était avec lui ; voilà pourquoi il a surmonté les épreuves sur son chemin de prophète. Au regard de tout cela, il devrait relativiser le reste et rendre grâce. Mais malheureusement, il demeure homme, un être marqué par le négatif qu'il a subi.
Le Seigneur par contre nous invite à la sérénité, à la confiance et à la miséricorde. La confiance en Dieu, c'est la foi. Quand cette foi vient à manquer, nous retombons dans le péché qui nous éloigne du regard bienfaisant de Dieu. Cela nous fait penser à Adam qui s'exclut du paradis terrestre à la suite de son forfait. La foi, la confiance en Dieu quant à elle nous ouvre les portes des divines grâces.
Puissions-nous, comme le Christ résister au péché et garder le flambeau de la foi pour le bonheur éternel en Dieu.