TROISIEME DIMANCHE DE CAREME C
L'extrait de l'évangile de ce 3e dimanche de carême évoque en moi le souvenir d'un fait insolite qui s'était produit dans une école, laissant dans l'amertume une mère qui en avait le cœur brisé.
En effet, un jour, à la sortie des classes, deux adolescents avaient engagé une conversation houleuse qui avait fini par dégénérer en bagarre. Parmi les deux antagonistes, l'un avait le contrôle du combat et réussissait à malmener son adversaire. N'en pouvant plus, celui qui était en position de faiblesse alla soutirer, dans son sac à dos rangé par terre, sa paire de ciseaux et se mit à poursuivre Josias, le bagarreur qui le torturait de coups de points. Comme le duel était devenu plus dangereux, l'un de leurs compagnons, relativement plus âgé et robuste, voulut les empêcher de continuer à se battre. Mais avant de réussir à les interrompre, il reçut malheureusement le coup de ciseaux qui lui fut fatal. Le temps d'alerter les pompiers, Alexandre le pacifique, gisant dans une mare de sang, perdit connaissance et quelques minutes plus tard rendit le dernier soupir. Une fois informée, la mère d'Alexandre hurlait de chagrin au chevet de son fils unique : elle était inconsolable, car c'était le seul et ultime espoir de sa vie.
Alors face à cela, que faire et quoi dire ? Quoi dire quand subitement tout devient sombre autour de nous ? Quels propos tenir qui soit plus fort que le silence quand la mort, cette insatiable, vient, une fois encore, nous dicter sa loi ?
Ordinairement, en de pareilles circonstances, nous n'hésitons pas à rechercher des coupables. Nous accusons un tel ou nous indexons tel autre ; nous jetons le dévolu sur les dirigeants, le système économique en place, sur la société et en dernier ressort sur le bon Dieu : Ô Dieu pourquoi ceci plutôt que cela, pourquoi nous as-tu abandonnés, pourquoi, pourquoi et pourquoi....?
Dans l'évangile de ce jour, nous nous retrouvons aussi dans un contexte similaire, un contexte lugubre qui laissent les Galiléens le cœur pétri de douleurs. Effectivement, des Galiléens étaient en train d'offrir des sacrifices à Jérusalem, puis Pilate les fit massacrer avec cruauté mêlant leur sang à celui des sacrifices qu'ils offraient. Dans la même ligne, des juifs étaient à Siloé pour offrir des sacrifices et par malheur, la chute de la tour a causé la mort de dix-huit personnes parmi eux. Alors, en rapportant ces faits divers à Jésus, les juifs veulent recueillir son avis. Pour leur répondre, Jésus dit ce qui suit : "pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres pour avoir subi un tel sort ? Eh bien, je vous le dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même."
En parlant ainsi, Jésus voudrait amener ses auditeurs à réaliser que dans la vie des humains, il existe parfois des situations terrifiantes qui surpassent tout entendement, et qui invitent à se remettre entre les mains de Dieu en implorant tout simplement sa protection et sa miséricorde en toute confiance. Car Dieu, étant le créateur de l'univers, est le seul susceptible d'expliquer et de justifier le cours des événements malheureux et parfois tragiques qui nous accablent et échappent à notre petite intelligence.
Ceci dit, Jésus achève sa conversation par la parabole du figuier qui peine à produire du fruit. Voici comment saint Luc nous le présente : "Quelqu'un avait planté un figuier dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n'en trouva pas. Il dit alors à son vigneron : Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et n'en trouve pas. Coupe-le. A quoi bon le laisser épuiser le sol ? Maître, supplia le vigneron, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. Peut-être donnera-t-il du fruit à l'avenir. Sinon tu le couperas."
Ici Jésus voudrait focaliser notre attention sur la patience de Dieu. Honnêtement, pour nous les hommes, dès qu'un drame se produit, et que nous mettons la main sur les coupables, comment ça se termine ? Soit nous les réprimons et les mettons en index, soit, au pire des cas, nous mettons tout en ouvre pour les éliminer. Mais Dieu, lui par contre, ne fonctionne pas de la sorte. Il laisse à chacun le temps pour se convertir. Il est très patient envers nous et nous amène tout doucement à bien agir : c'est cela produire du fruit.
Ah ! Et si nous imitions un peu cette patience de Dieu, comme ce serait beau, comme ce serait plus facile pour nous de supporter nos frères et sœurs et ainsi les aider à s'améliorer ! Amen