Homélie du 16è dimanche du temps ordinaire, année C
Bien aimés du Seigneur,
Les textes de ce 16è dimanche du temps ordinaire année C, nous parlent de l'importance de l'hospitalité. L'hospitalité c'est l'art d'accueillir les uns les autres, d'entrer en relations avec eux et de vivre, de partager avec eux des expériences ordinaires et parfois même extraordinaires. A force d'aller à la rencontre des gens, et de les accueillir chez soi, on peut fortuitement ou inconsciemment rencontrer à travers eux le Seigneur lui-même. C'est d'ailleurs ce que nous relate la première lecture de ce jour :
C'était aux chênes de Mambré, à une heure chaude de la journée. Abraham, assis à l'entrée de sa tente, aperçut trois voyageurs qui passaient. Il leur offrit l'hospitalité sous les chênes- les chênes aux yeux des cananéens, étaient des arbres sacrés-. Il leur proposa de s'étendre un peu. Pendant ce temps, il mit rapidement à contribution sa femme Sara et l'un de ses serviteurs pour leur apprêter le repas. A table, alors qu'ils échangeaient, le voyageur annonça à Abraham que l'an prochain au moment fixé, sa femme Sara concevrait et enfanterait un enfant. Le voyageur dont il est question dans ce texte, c'est Dieu lui-même qui, sous une forme humaine, choisit de visiter Abraham, celui à qui justement il fit jadis la promesse d'une descendance aussi nombreuse que les grains de sable au bord de la mer.
Chers amis, Dieu a visité Abraham. Il peut également nous visiter. Il se présentera à nous sous l'apparence d'un frère, d'une sœur, d'un malade, d'un pauvre, d'un indigent, d'un ivrogne et même d'un fou. A nous de savoir ouvrir grandement nos bras pour accueillir toute personne qui a besoin de notre aide ou de notre attention en toutes circonstances. La lettre aux hébreux nous y exhorte vivement : "N'oubliez pas l'hospitalité : elle a permis à certains parmi vous, sans le savoir, de recevoir chez eux des anges" He 13,1-2.
Jésus nous le répétera en d'autres termes : " Chaque fois que vous l'avez fait à l'un de ses petits qui sont les miens, c'est moi-même que vous l'avez fait "; ou encore: " celui qui vous reçoit me reçoit et celui qui me reçoit, reçoit celui qui m'a envoyé (Dieu)."
Dans l'extrait de saint Luc que l'Eglise nous propose aujourd'hui, Jésus, dans le cadre de l'hospitalité, semble critiquer Marthe pour le bon travail qu'elle fait en préparant le repas. En réalité elle reçoit le Seigneur, comme l'a fait Abraham dans la première lecture. Le Christ ne lui reproche pas de vouloir bien accueillir ses invités, mais d'être trop soucieuse, de trop s'en faire. En la reprenant au moment où elle râlait contre l'attitude de sa sœur Marie qui ne l'aidait pas à faire le service, Jésus voudrait attirer notre attention sur deux faces d'une même pièce : l'action et la contemplation. Marthe était dans l'action en servant le Seigneur, et Marie dans la contemplation en écoutant le même Seigneur.
Dans notre monde de consommation, nous avons du mal à contempler, adorer, prier... La course effrénée de la vie, de l'argent, des voyages, risque de nous faire perdre l'esprit d'intériorisation et de faire de nous des êtres diminués, superficiels. Si le spirituel est étouffé, il se crée un vide et un déséquilibre dangereux. Il ne s'agit donc pas d'opposer Marthe l'active à Marie la contemplative mais de comprendre que ses deux femmes représentent deux aspects importants de notre vie chrétienne. Cette vérité évangélique, Saint Ignace de Loyola l'a si bien comprise qu'il exhortait constamment ses Jésuites à devenir des contemplatifs dans l'action. Dans la même mouvance, Saint Benoît construisit toute la spiritualité chrétienne sur deux principaux piliers : la prière et l'action ( ora et labora).
En répondant à Marthe, Jésus n'est pas allé par quatre chemins :" Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t'agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée."
Une mauvaise interprétation de cette réponse peut faire sourire les désœuvrés ou tous ceux qui prennent plaisir à s'installer dans l'oisiveté, le relativisme ou la négligence. L'écoute de la Parole de Dieu, les heures de méditation ou de contemplation ne sont pas des occasions de fuite de travail ou de fainéantise, ces moments nous disposent plutôt à mieux gérer nos journées de travail en vue d'un progrès remarquable. "Ta parole Seigneur est la lumière de mes pas, la lampe de ma route"
Puissions-nous saisir cette interprétation du Christ qui nous pousse à devenir des contemplatifs dans l'action, pour un monde meilleur Amen !